CultureMATH -
accueil - contact


"Pourquoi les mathématiques sont-elles difficiles?" de Leny Oumraou


Présentation de l'éditeur



Présentation du livre

Pourquoi les mathématiques sont-elles difficiles? (Editions Vuibert, 2009)

par  Leny Oumraou

      Docteur agrégé de philosophie - Lycée Charles Péguy (Orléans) et Université Paris I  - e-mail



      D'après Jean Dieudonné, un mathématicien est avant tout « quelqu'un qui a publié au moins la démonstration d'un théorème non trivial »[1]. Autant dire qu'il n'y a de mathématicien que parce que les mathématiques sont difficiles...
Pourtant, cette difficulté est quasiment contre-nature : comme l'a souligné Poincaré, dans l'activité mathématique, l'esprit « n'agit ou ne paraît agir que par lui-même et sur lui-même »[2]. D'où peut donc provenir la difficulté qu'il y rencontre ? Par une démarche résolument heuristique, inspirée des recherches de Pòlya, il s'agit de comprendre le processus par lequel on passe de la formulation d'un problème mathématique à la découverte d'une solution. On montre ainsi que, comme l'avait soutenu Kant, le mathématicien ne peut se contenter d'analyser la signification des termes d'un problème pour le résoudre, et qu'il lui faut recourir à des éléments auxiliaires (hypothèses auxiliaires, constructions auxiliaires, théorèmes auxiliaires, etc.), devant paradoxalement s'ajouter aux données du problème sans toutefois modifier celui-ci.
Mais si les mathématiques s'avèrent ainsi plus synthétiques qu' analytiques, il n'est pas nécessaire d'y faire intervenir une « intuition » spécifique, plus ou moins mystérieuse. La voie de Pòlya consiste bien plutôt à montrer comment la découverte peut être le fruit de « démarches raisonnées », de véritables stratégies de recherche, dont la logique peut parfois fournir des descriptions formelles susceptibles d'en clarifier la nature.

L'ouvrage est divisé en trois grandes parties :

Première partie : Chapitre 1 – Il y a deux manières d'envisager les objets mathématiques, relativement à l'esprit qui cherche à les connaître. Ou bien l'on considère que ces objets existent indépendamment de l'esprit humain (ce que l'on appelle ordinairement la conception « réaliste », que l'on qualifie ici d'externaliste) ; ou bien l'on considère qu'ils ne sont qu'un produit de l'esprit humain (conception internaliste). La conception externaliste échoue à expliquer comment les esprits incarnés que nous sommes parviennent à accéder aux entités désincarnées dont parlent les mathématiques. La conception internaliste, adoptée ici à titre d'hypothèse de travail, paraît, de son côté, difficilement conciliable avec la difficulté des mathématiques : si l'esprit n'y rencontre que ce qu'il a lui-même produit, pourquoi peine-t-il à le connaître ? Le Chapitre 1 vise précisément à démonter l'affirmation, faussement évidente, que l'on doit connaître parfaitement ce que l'on a soi même produit.

Deuxième partie : Chapitres 2 et 3 Cette partie aborde de front la question de savoir si les mathématiques sont analytiques (Chap. 2) ou synthétiques (Chap. 3). Après avoir montré l'insuffisance d'une conception des mathématiques fondée sur la seule analyse des significations, on cherche à préciser en quel sens elles sont synthétiques ; on examine ainsi les thèses de Beth, Hintikka et A. Robinson. Les deux premiers prétendaient rendre compte du caractère synthétique des mathématiques en y soulignant le rôle des règles logiques d'instanciation - correspondant formel des « constructions auxiliaires » ; le troisième s'appuyait, dans le même but, sur le Théorème de Herbrand. Ce ne sont rien moins que l'usage des lemmes et l'épineuse question de la « pureté des méthodes » qui sont ainsi abordés : dans quelle mesure est-il légitime de prouver un énoncé en recourant à des moyens qui transcendent sa formulation (par exemple, prouver un énoncé appartenant à l'arithmétique par des moyens analytiques) ?

Troisième partie : Chapitre 4 – Le terrain est ainsi préparé pour aborder la question proprement heuristique. Il s'agit d'abord de préciser ce qu'est l'heuristique (art de découvrir, vs arts de conjecturer et d'inventer), et de montrer comment des résultats de la logique moderne éclairent la nature de la recherche des démonstrations (« heuristique des preuves »). C'est ainsi que l'on montre, notamment, que le moderne « calcul des séquents » fournit de nouveaux éclairages sur la résolution des problèmes telle que la décrivait Pappus au IIIe siècle. On aborde également l'heuristique « mécanique » telle qu'elle est définie et développée en I.A. et en algorithmique.








[1] Pour l'honneur de l'esprit humain, 1987, Hachette.

[2] Science et méthode, 1908.