Travail manuel et enseignement mathématique (1923)
Instructions du 20 juin 1923 relatives au nouveau plan d’études des écoles primaires élémentaires, Bulletin administratif du ministère de l’instruction publique, tome 114, pp. 75-137 [Extrait]
Le travail manuel est admis, depuis quarante ans bientôt, parmi les disciplines de l’enseignement primaire. Mais quel que soit l’intérêt qu’il présente, soit au point de vue de l’éducation générale, soit au point de vue de l’éducation professionnelle, on ne peut pas dire que, sauf dans les écoles maternelles et les écoles de filles, il soit très régulièrement pratiqué.
Pourquoi cette innovation de la génération qui nous a précédés n’a-t-elle pas eu plus de succès. C’est d’abord parce que l’ancien plan d’études, trop exigeant pour cet enseignement, réclamait pour lui trop de temps […]. Les conférences pédagogiques de 1921, qui ont étudié la question, ont été unanimes à demander que cet horaire fût réduit. Le nouvel emploi du temps donne satisfaction à ce désir […]. Si l’on remarque que certains exercices pourront être exécutés dans les classes de géométrie, dans les classes de sciences physiques et naturelles, dans les classes de dessin, on ne sera pas tenté de croire que nous faisons à cet enseignement une place trop petite. Et, d’autre part, en réduisant d’un tiers ou de moitié l’horaire que lui assignait l’ancien plan d’études, nous avons la certitude de supprimer un des obstacles qui nuisaient à son succès : il sera d’autant plus en honneur qu’il portera moins ombrage aux autres disciplines.
Il leur portera d’autant moins ombrage qu’il s’associera plus étroitement à elles. Cette étroite association, le nouveau programme cherche à la réaliser. Et, sur ce point encore, il se conforme aux vœux des conférences de 1921. Si l’enseignement manuel n’est plus considéré comme une partie de l’éducation physique, s’il est placé, dans le nouveau plan d’études, immédiatement après le dessin, ce n’est pas seulement parce qu’il est par nature inséparable du dessin, c’est aussi parce que, comme le dessin géométrique, il se relie intimement à l’enseignement scientifique. Dès le cours préparatoire, jusque dans les jeux qui constituent pour les enfants de six ans l’essentiel du travail manuel, apparaît le souci de lier cet enseignement à celui de l’arithmétique : les petits travaux de découpage serviront à la représentation des nombres. Au cours élémentaire, les exercices habitueront les enfants aux figures géométriques : on construira des figures planes, on les combinera, on les décomposera en leurs éléments, on les superposera. Et de ces différentes opérations résultera une connaissance concrète des vérités géométriques élémentaires, la première révélation de ces vérités qu’ils apprendront ensuite à abstraire et à généraliser. Au cours moyen, le travail portera sur des figures géométriques plus compliquées, sur des solides ; mais le même profit sera tiré de cette alliance des deux disciplines : quiconque sait avec quelle difficulté les enfants et même les jeunes gens se représentent les figures géométriques « dans l’espace » comprendra de quel secours peuvent être pour l’enseignement mathématique des exercices ayant pour objet la construction matérielle de ces figures.